Combattants de la guerre de 14-18

 
 

FAURE GERMAIN

 

LE 2e REGIMENT DU GENIE
16éme Bataillon 52éme Compagnie.

 

Début octobre 1915 le front de Champagne, s'étend dans une région de larges ondulations où les mouvements de terrain les plus élevés vont de 188 et 190 mètres. Quelques collines aux pentes plus rapides dominent le pays, ce sont les « Buttes ». Des bois de pins dont les lisières affectent des formes géométriques couvrent la plupart des hauteurs. Les routes sont bordées d'arbres qui  permettent de les identifier de loin. Le paysage a un aspect simple et linéaire.  La vue s'y étend à de grandes distances.
Les villages sont rares et bâtis presque tous au bord des petites rivières, la Suippe, l'Aisne, la Tourbe, dont les vallées suivent, entre des massifs boisés, de légères dépressions. Ce sont les villages de Souain, Perthes, le Mesnil et Massiges. Jusqu'en ces temps de guerre c'étaient les seuls noms qui figuraient sur les cartes d’État-major. Mais depuis un an une nomenclature géographique nouvelle est née. Il n'est pas de mouvement de terrain, il n'est pas de bois, qui n'ait été, pour des commodités militaires, numéroté ou baptisé selon sa forme ou selon la fantaisie de l'artilleur ou du fantassin.  

Il en est de même de tous les aménagements ennemis dont nous connaissions les détails. Chaque tranchée, chaque boyau, a reçu de nous un nom : le Kaiser, Hindenburg, Von Kluck,  fleuves et les villes d'Allemagne….

La première position allemande,  qui formait la principale ligne de résistance, comprenait de deux à cinq  tranchées, s'échelonnant sur une profondeur de 300 à 500 mètres, avec des défenses accessoires, réseaux impénétrables de fils de fer et de chevaux de frise, abris-cavernes contre le bombardement et fortins garnis de mitrailleuses. De loin en loin, le réseau des tranchées formait de véritables labyrinthes qui, connus de nos hommes, avaient reçu des noms caractéristiques : le saillant, le trapèze, la courtine, l'éperon, le bastion…
L'état-major allemand avait prévu une deuxième ligne de résistance sur les hauteurs qui dominent au sud la vallée de la Py. Ils avaient organisé avec soin des emplacements de mitrailleuses. Le réseau de fils de fer très dense, qui les protégeaient, étaient soigneusement enterré et placé à contre-pente pour en diminuer la visibilité.
Entre les deux positions séparées par une distance de 3 à 4 kilomètres, toutes les coupures du terrain avaient été aménagées en vue d'une défense pied à pied. Des boyaux de communication reliant les deux lignes et protégés par des défenses accessoires, permettaient de compartimenter le terrain au cas où une partie de la première ligne céderait.(1)

 

 
OCTOBRE 1915 LA MAIN DE MASSIGES
 
Le vendredi 1er octobre 1915, la compagnie 16/52 du 2eme Régiment de Génie est constituée.
L'effectif comprends deux officiers : le lieutenant Labaume et le sous-lieutenant de Coninet, ainsi qu'un aspirant, un adjudant qui vient du 342eme RI de Lodéve, un sergent major, quatre sergents, un caporal fourrier, huit caporaux, 117 soldats, deux chevaux de selle, deux mulets.  Soixante hommes viennent de la 16/2, cinquante sept autres de l’infanterie, du 25eme RIT notamment.
La 32eme Division, à laquelle ils appartiennent, est affectée au 1er Corps d'Armée. Elle doit conduire des attaques à la main de Massiges
 
La compagnie bivouaque dans le ravin de l’Etang entre le Pouce et l’Index. Elle travaille de nuit (3/4 de l’effectif) à l’organisation du secteur compris entre le boyau d’Ukermarck et le boyau de Moltke ( Entre les ouvrages de la Défaite et le Mont-Têtu)
 


Le 6 octobre 1915 la compagnie est mise à disposition du 80eme RI qui doit attaquer le Bois Marteau à l'Est des ouvrages de la Défaite)
Départ prévu du Ravin à 4h. La 1er section marche avec la 2eme vague. Le reste de la Cie accompagne  la 4eme vague. A 5h 30 l’attaque est lancée
Après s’être avancée avec l’infanterie, la 1er section se replie, suivant le mouvement des fantassins. Elle est alors employée à enlever des éléments du réseau brun, et à l’établissement de sapes destinées à relier notre 1ere ligne avec des éléments de tranchées tenues par quelques groupes de tirailleurs.
La moitié de la 1ere La nuit, la compagnie remet de nouveau éléments de réseau brun devant notre première ligne et continue les travaux de sape. Deux hommes sont tués (Heberterne, Antony), neuf blessés, un disparu (Lafont)
 


7 octobre bivouac au Ravin de l’Etang. Dans la nuit du 7 au 8 la compagnie construit quatre abris blindés pour mitrailleuse.
8 octobre. Construction et pose de chevalets Lagarde
9 et 10 octobre. Amorce de sept sapes à l’est du boyau Normand dans le but de poster notre première ligne à la crête. Le sergent Gaudel est tué, un blessé. Arrivée en renfort de 8 sergents puis de soixante-quatre hommes venant notamment du 9eme bataillon de marche du 53eme RI.
 


Le 12 octobre 1915 Germain Faure arrive au 2éme Régiment de Génie

 


Du 14 au 17 octobre. Construction de sapes volantes à l’est du boyau de Molke ayant pour but d'atteindre depuis nos lignes les emplacements des batteries allemandes.
La compagnie est relevée dans la nuit du 17 au 18. Départ à 6h arrivée à 10 à Dommartin sous Hans où elle passe la nuit. Départ le 20 à 7h pour Saint Rémy sous Bussy où elle arrive à 11h30.Elle va y rester au repos quatre jours.
 
PERTHES - TAHURE

Le lundi 25 octobre à 7h la compagnie quitte Saint Rémy sur Bussy. Elle arrive au Camp C, au nord de l'antique voie romaine, à 2 km au sud de Perthes. La 32eme Division dépend désormais du 16eme Corps d'Armée.
Le mercredi 27 octobre départ 1h 30 pour la carrière du Bois de la Savate, sur la route de Tahure à Souain, où elle arrive à 16h. Reconnaissance par les officiers du secteur de la Butte de Tahure. La compagnie travaille la nuit à l’aménagement des boyaux et des tranchées de la première lignes situés sur la pente nord de la Butte de Tahure.
Le
29 octobre, construction de portiques et pare-éclats dans les boyaux descendant la pente nord.
 


Le
30 octobre à 18h l’ennemi, après un bombardement intense et l’émission de gaz asphyxiants, déclenche  une contre-attaque sur la Butte de Tahure. Nos troupes ayant du céder, la compagnie exécute dans la nuit une tranchée de replis entre la route Tahure-SommePy et le ravin 149. Le sergent Parradon est tué.
 

31 octobre, bivouac au Bois de la Savate. Nous contre attaquons. Une section marche avec les troupes d’attaque dés huit heures. Le Commandant Maubernard est tué. Deux sections vont, pendant la nuit, poser des éléments de réseau brun devant les tranchées reprises à l’ouest du boyau Rauch. Tué Vidal Joseph.
 

3 Novembre, pose de réseaux Brun et de piquets avec fil de fer entre le bois des Murs et le bois K2.Sont tués : Rivieres, Micheux, Mestre, Cullier. Trois blessés Disparu Garabé.
 

En Champagne, après un bombardement d'une extrême violence, les allemands ont attaqué en force et à fond, sur un front de huit kilomètres, « jalonné, suivant les termes du communiqué officiel du 31 octobre, par l'arbre de la cote 193, la butte de Tahure, le village de ce même nom et les tranchées au sud jusques et y compris; l'ouvrage de Courtine ».
Cette attaque très rude et très acharnée, a été presque partout enrayée et refoulée. La masse principale a. cependant réussi à atteindra le sommet même de la butte qui,
dans cette région conquise à la fin de septembre, est pour nous une position d'un haut prix. Si elle y restait et qu'elle eût. le temps de s'y consolider, un des bons résultats de notre dernière offensive aurait disparu. Elle n'y restera pas.
Les masses allemandes qui ont mené l'assaut étaient formées en majeure partie de troupes venues du front russe. C'est un tail significatif. (2)

 
Les fêtes de la Toussaint ont été lébrées dans les églises avec une grande piété. Dans les cimetières, sous un ciel mélancolique, le flot des visiteurs a été énorme. La foule s'est portée surtout avec empressement vers les tombes de nos héros reposant à l'ombre de la croix et du drapeau.
Sur notre front, les journées récentes ont été surtout marquées par toute une série de violentes attaques contre les positions récemment conquises dans la région de Tahure. Sur l'ensemble du front, l'ennemi a été repoussé avec des pertes très lourdes. Mais il a pu réoccuper la crête de Tahure, sans pouvoir descendre au village. Espérons qu'il n'y demeurera pas longtemps.(3)
 
Le 7 novembre le trois quart des travailleurs est occupé, la nuit seulement, à la construction d’une ligne de soutien, dans le ravin 149, entre le boyau Ranch et la route Tahure-Gratereuil. Elle bivouaque au bois de la Savate jusqu'au 15. Ensuite elle va au Camp C mais continue le chantier du ravin 149 jusqu'ai 27 novembre.
 

1916

 
Le lundi 29 novembre la compagnie quitte le secteur de Tahure. Elle embarque à 15h à la gare de St Hilaire au Temple pour Epernay, où elle débarque à 17h. Elle continue ensuite sur Damery. Elle arrive à 23h à Venteuil, la ferme d’Harmançon. Le cantonnement est à une dizaine de kilomètres d'Epernay en bord de Marne.
Du 3 décembre au 4 janvier 1916  Cantonnement à Venteuil, instruction technique et militaire des hommes et des gradés.

Le 5 janvier elle quitte son cantonnement pour Romilly.  Jusqu'au 11 janvier elle va monter des baraques au camp de Romilly. La compagnie participe aussi aux manœuvres de brigades, le12 janvier 64éme, 15 janvier 63eme, 18 janvier 32eme Division.
 
SOISSONS
25 janvier cantonnement à Septmonts à sept kilomètres au sud-est de Soissons. Les officiers effectuent la reconnaissance du secteur ouest de Soissons.
La première section avec le parc le commandement et le bureau, va cantonner à Soissons au patronage Jeanne d’Arc, 7 rue des Feuillants. Elle est chargé de l'organisation défensive du sous-secteur de Saint Christophe au nord de la cathédrale.

La 2e section est à Vauxbuin elle organise la ligne du Bas des Pentes dans le sous secteur Vauxbuin. La 3e section est à Pernant. Elle est chargée de la ligne de soutien du Bas des Pentes du sous-secteur de Pernant et Mercin. La 4e section, à La Roche, est chargée de la ligne des Hauts Plateaux.
Ces travaux vont se poursuivre jusqu'au samedi 19 février.

 
A partir du 20 février la 2eme et 3eme section  viennent cantonner à la caserne de Soissons.

Dés lundi 21 travaux aux ouvrages sur l'Aisne. Installation d’un masque pour cacher aux vues de l’ennemi la passerelle du pont de ciment. Réfection de la passerelle du pont de ciment (montage de deux chevalets).
Le mercredi approfondissement des boyaux d’accès à l’embarcadère du bac à traille, embarcation qui se déplace le long d'une chaine tendue entre les deux rives, en amont du pont des anglais RD et RG.

Du 24 au 29, construction sur la rive droite, d'abris pour la traille en amont du pont des Anglais et celle du pont de ciment. rive droite Construction d’abris au pont de ciment pour explosifs et sapeurs.. Approfondissement des boyaux menant aux trailles.

Début  mars construction de trois radeaux de tonneaux pour la passerelle du Boulevard de Strasbourg qui relie au faubourg de Saint Vaast. Préparation des culées de passerelle. Etudes des voies d’accès menant à la passerelle et au pont de pilotis construit par la Cie 16/2.
Le Capitaine Raynaud commandant la 16/52 est évacué pour maladie il est remplacé parle Lieutenant Labaume.
Mise en Place travée de culée rive gauche mise en place des radeaux et des deux portières devant constituer la passerelle. Mêmes travaux rive droite. Mise en place tablier de la passerelle et guidage de ce tablier. Pose du garde corps. A partir du 17 mars travaux de terrassement des voies d'accés
26 mars la compagnie change de cantonnement sur ordre du commandant de la place de Soissons. Elle est logée à l'abri dans dans les caves, notamment dans la crypte de l'église de l'ancienne abbaye de Saint Jean des Vignes.

Le 1er Avril le Capitaine Py provenant de la 7eme Armée prend le commandement de la Cie 16/52. La 4eme section se rend pour une semaine au centre d'instruction de Villemontoire. Après elle, chaque section y sera envoyée à tour de rôle.
A partir du 5 avril travaux dans les souterrains et caves de St Jean des Vignes. La nuit continuation des travaux aux accès des ponts : consolidations, murs de soutien, agrandissement des boyaux. A Saint Jean des vignes une fouille heureuse a permis de trouver une cave 13, 5 m sur 4 m. Le déblaiement est entrepris. De la cave part une galerie se dirigeant vers le boulevard St Jeanne d’Arc. Déblaiement de cette galerie. Recherche de nouvelles caves par sondage. Déblaiement d'une grande galerie prenant naissance Boulevard Jeanne d'Arc et passant sous les nouvelles casernes. Elle aboutit à l'ancienne poudrière. Longueur 121 m.
Le 24 avril débute l'empierrement de la voie d'accès au pont de pilotis, rive droite, Une équipe de sapeurs du 16/52 est occupée lanuit au transport de des pierres cassées, déchargées à pied d'œuvre.
Du  1er au 7 mai ; Etude du centre d’appui du « Trou Noir » carrière au nord-ouest. du château de Pernant. Le piquetage des tranchées, des boyaux et réseaux de fil de fer et de la saignée à réaliser dans le bois au centre d’appui Le Trou Noir. Simultanément des équipes travaillent aux souterrains de ST Jean des Vignes et aux accès des ponts et passerelles. Piquetage à la Buerie Chevreux, ensuite au centre de Presles,
Le 13 mai la 3eme section se rend a Pernant où elle cantonne. Aidée de fantassins du 35eme Régiment Territorial elle doit s'occuper des travaux au « Trou Noir » et de la continuation des abris commencés par le 109eme RIT
Du 18 au 20  Mai. Piquetage de deux abris prés du cimetière de Mercin et des boyaux donnant à ces abris. La 2eme section y cantonne auprès de l'église. Jusqu'au 10 juin elle s’occupe du piquetage et tracé des boyaux, tranchées et des fils de fer entre La Notte et  Mercin (1er et 2eme ligne du pied des pentes), de la construction d"abris (deux prés du cimetière accueillant une demi section) et deux abris de mitrailleuse à l’Est du cimetière, route de Mercin à Soissons.

Du 22 mai au 10 juin. La 1er section, à Soissons, s’occupe de la garde au pont aux anglais, de l’entretien des passerelles. Une escouade de cette section s'occupe des fouilles à St Jean des Vignes et de l’empierrement des voies d’accès au pont à pilotis.
Le 11 juin retour à Saint Jean des Vignes. Le service est passé à la compagnie 16/3. Le 13 la compagnie quitte Soissons et va cantonner en attendant des instructions dans les carrières de Vierzy.
 
SOURCES :
JMO 26N 778/5
JMO 26N 778/
9
JMO 26N 1264/14
(1) La Croix N°9988 - (3) La Croix N°10015 -  (2) L'Humanité N°4215
L'Echo de Paris 1er novembre 1915