Mort à la guerre de 14-18

 

 
 

SARRAIL Henri Raymond
 

Tué au plateau de Californie à Craonne  (Meuse) le mardi 24/07/1917. Il était âgé de trente quatre ans.
 

SARRAIL Henri Raymond est le fils de Pierre et Anne Sicre. Il naquit à Limoux le 29 mars 1882.
En 1911,  il habitait dans la commune de Mazerolle où il était domestique. Il avait les cheveux et les yeux châtains. Il mesurait 1,62m .
Après le conseil de révision de Chalabre  il est ajourné pour faiblesse. Il est versé aux services auxiliaires en 1905 et passe à la réserve le 1er octobre 1906.
La commission de réforme de Carcassonne du 1er décembre 1914  le juge bon pour le service armé. Il est affecté au 81eme Régiment d'Infanterie de Montpellier le 19 décembre suivant..
 

 
 
81eme REGIMENT D'INFANTERIE
Le 81eme Régiment d'Infanterie de Montpellier appartient en aout 1914 à la 2eme Armée en Lorraine.
Le colonel Aubert commande le régiment, 3261 hommes dont 60 officiers. A la mi décembre le régiment combat en Flandres (Ypres) avec les Britanniques.
Cent hommes, dont vraisemblablement le soldat Sarrail, et neuf officiers arrivent en renfort à Dickbush le 20 décembre 1914. Les tranchées occupées par les hommes sont à Saint Eloi.

De mars à septembre 1915 le régiment est en Champagne. Il arrive dans le secteur de Somme Tourbe. Il se bât au Bois Oblique, Beauséjour, le Trapèze, Tahure...
A la mi octobre le régiment est réorganisé..
 
334eme REGIMENT D'INFANTERIE
Deux cents  hommes du 84°RI dont Raymond Sarrail passent au 334eme RI. Ils arrivent dans les  dans la région sud des Vosges à Wattwiller le 25 octobre 1915. Les jours précédents, 15 et 16 octobre, 6 officiers tués, 6 blessés, 3 disparus; hommes de troupe 59 tués, 173 blessés, 159 disparus. Ils sont répartis dans les deux bataillons. Les combats font rage pour la possession du Hattmanwillerkopft (le Vieil Armand 957m)

Au mois de février il arrive sur les pentes sud est du Grand Ballon. 15 février tempête de neige
Le 4 juin 1916 cantonnement à Dannemarie et à Badricourt Le Régiment tient avec le 4eme BCP le centre de Résistance du Bois Carsparch (Schonhozs au nord, Leschenholz au sud.
14 juillet 1916. Dans la nuit une patrouille ennemie s'est approché du petit poste de la sape N°2, un de nos guetteurs a blessé un allemand, que les patrouilleurs ont emportés dans leurs lignes. Une de nos patrouilles a surpris une patrouille allemande vers le Sfasselbachle et la mise en fuite. Rafales de mitrailleuses. Bombardement de la région de la Maison forestière (une soixantaine d'obus de 109
 

Le 11 mai 1917 est débarqué à Glennes Les deux bataillons du régiment stationne dans les cavernes des carrières au sud de Glennes. Reconnaissance du sous secteur est du plateau de Vauclerc
Au 1er mai 1917 le régiment est commandé par le Lt Colonel Belhumeur. 5eme bataillon Commandant Eigez/ 6eme bataillon Commandant Moréteau.

Glennes

CRAONNE
 

 
EXTRAIT DU JOURNAL DE MARCHE DU 334eme REGIMENT D'INFANTERIE
 

Carte d'Etat Major des zones de combat

 

Compte rendu des opérations du 22 au 27 juillet 1917 (Plateau de Californie)

 

Deux attaques ennemies avaient mordu largement dur les postions confiées à la 18° DI. Le 19 juillet la 5° Division avait pénétré dans notre tranchée aux ailes du plateau des Casemates ; le 22 juillet le 8° régiment avait pris pied sur le plateau de Californie.

La situation  sur le plateau de Californie était critique. Le moindre effort et sans doute l’ennemi le préparait déjà, délogerait des pentes abruptes dominant Craone les débris de la 18 D.I. qui s’y maintenaient accrochés.

22 juillet : … …Toutes ces marches et contre marches, par une chaleur très forte, et en partie sous le feu très vif de l’artillerie ennemie, avaient beaucoup fatigué et énervé la troupe, et rendu le ravitaillement en vivres impossible… 

23 juillet : La lutte d’artillerie continue, Violente. Le bataillon Toussaint creuse sa tranchée vers le sommet de l’escarpement qui tombe sur Craonne, et cherche à pousser de petits éléments en avant de la crête, de façon à s’y constituer au moins en ligne de surveillance. Ses patrouilles s’infiltrent assez aisément dans les boyaux de Californie…mais le tir de notre artillerie pourtant prévenue fait des victimes parmi les patrouilles et limite notre avance.

Dans l’après midi arrive un ordre d’attaque générale pour reprendre le 24 juillet le terrain perdu les jours précédents. Le 334 RI doit attaquer le bord Est du plateau. Les reconnaissances s’opèrent la nuit.

24 juillet : …Dans la nuit très noire, sous une canonnade très vive, la mise en place des troupes d’attaque s’effectue à tâtons, lentement, péniblement. La compagnie Bouissoud est bloquée par le feu dans ses abris a de grandes difficultés à se déployer

 

 

L’assaut, Et voici l’heure H (4 heures 15) L’attaque n’a pu être différée. L’heure officielle même n’a pu être communiquée à tous, en temps utile. Toutes conditions sont aussi défavorables que possible. Cependant à l’heure H-1, le barrage de notre artillerie s’est déclenché.
Aussitôt tout ce qui est sur la ligne de départ s’élance ; La compagnie Piguet, à droite, enlève la tranchée de doublement, puis la tranchée Béarn, malgré l’obstacle d’un réseau de fil de fer. L’ennemi s’enfuit dans le ravin, laissant entre nos mains neuf prisonniers (dont deux blessés). Mais la compagnie ne put progresser au delà, car malgré l’envoi répété de fusées à trois feux, le barrage se maintint longtemps devant la tranchée de Béarn. Quand, après dix minutes au moins, l’allongement du feux fut obtenu, l’ennemi garnissait en force la tranchée Von Bochon, protégée par un réseau, et ses tirs de mitrailleuses et de grenades à fusil  arrêtèrent le mouvement de la compagnie. Celle-ci s’établit alors dans la tranchée de Béarn

A la gauche de notre ligne, la progression fut moins facile…les allemands, debout, coude à coude, sur le parapet, fusillait à courte distance notre vague d’assaut. Le tir de notre artillerie fut demandée sur l’ouvrage Lacroix...

Au centre, la Cie Muller laissa longtemps ignorer son sort. On apprit enfin que sa vague, bien qu’incomplète s’était résolument portée à l’assaut

La contre attaque. A 16 heures 20, le bombardement, demeuré très vif, prit tout à coup une violence extrême ; des torpilles s’y mêlaient. Quelques instants après, une puissante contre attaque se prononçait sur tout notre front. Plusieurs tentatives furent rejetées dans le ravin. Mais un nouvel effort de l’ennemi fit fléchir la ligne vers le centre de la compagnie Muller, qui se trouva tout à coup débordée, et même enveloppée. Sa résistance avait épuisées ses munitions, et les nombreuses boites à mitraille trouvées dans la tranchée prise. La Cie Muller très éprouvée dut se replier dans la tranchée de soutient. Ce repli découvrait la gauche de la compagnie Richard qui du elle-même lâcher la tranchée. …
La situation fut un instant critique. L’ennemi était nombreux, les munitions manquaient. L’arrivée de deux sections de la 22 Cie arrêta tout progrès de l’ennemi...

La fatigue de la troupe était extrême les effectifs en ligne très réduits. Les Cie qui étaient partie à l’assaut qu’avec une centaine d’hommes, ne comptaient plus que de 40 à 50 combattants.

Pertes : un officier tué,  sept officiers blessés et cinq évacués. Troupe : quarante huit tués, deux cent onze blessés, cinquante disparus Au total : trois cent neuf soit 40% de l’effectif engagé.
 

 

DEVANT CRAONNE

C'est plus fort que Verdun...

De l'envoyé spécial du Petit Journal- Albert Londres
 

Front français, 24 juillet - Est-ce un nouveau Verdun?

On dit que oui dans les journaux. Ici sur place, cela nous apparaît pas.

La rage est peut-être la même , non l'envergure. Pour les défenseurs qui luttent sous la pluie incessante du fer, c'est Verdun qui recommence; pour les chefs qui percent les desseins, c'est simplement une attaque sur le chemin des Dames.

C'est une attaque formidable et qui nécessite dans les communiqués pour que l'intensité en soit rendue, l'emploi des mots qui décrivaient Verdun.

Le front dans toute sa longueur  est maintenant blindé. Cette ruée furieuse la signifie et au fond ne signifie que cela. Quelles que soient les ambitions de l'adversaire, même si elles sont courtes. Il sait que pour les atteindre il devra payer cent fois leur valeur, ce que l'on n'aurait pas payé pour une victoire en 1914.

C'est ce que l'on se dit devant Craonne. Depuis deux jours et deux nuits que sous nos oreilles, nous entendons rouler le canon et que, sous nos yeux, nous voyons noirs le jour et rouges la nuit les obus perforer le plateau, si nous avions consenti à oublier un moment la portée de leur de leur attaque, nous aurions pu nous vcroire sur le front d'une grande bataille. La Marne pour nous et Charleroi pour eux furent moins infernales. Jadis le sort des pays coutait moins d'efforts qu'aujourd'hui la conquête d'un chemin.
 

La ruée le feu au poing

Ils ont bombardé, pendant huit jours et après avec leurs troupes de tempête et le nouveaux engins d'infanterie se sont rués le feu au poing. Le plateau de Californie n'avait pas volé son nom, c'est sans doute en prévision de ces journées- là qu'on l'avait baptisée. Pour y faire chaud, il y faisait chaud. Et le plateau des Casemates avait chaud aussi "Intensité de feu inouïe" disait le communiqué.
Le communiqué qui est une personne froide, trouvait que ce qu'il voyait était inouïe, que devions nous trouver, nous, alors?

Nous trouvâmes d'abord que nous étions confondus.
On a beau avoir vu beaucoup de choses, on n'avait pas vu autant. Des obus qui tombent, ce n'est pas nouveau n'est ce pas? Ni une pluie d'obus non plus, ni même une avalanche, c'était une nouvelle nature qui ce superposait à l'autre, une nature de feus, de bruits, de fumées et de geysers. Le monde n'était plus le monde, c'est comme si tout à coup un homme ,s'était changé devant vous en quelque chose d'inconnu.

Pour ça c'était Verdun. Les blessés qui sortaient des boyaux le disaient, ils disaient davantage ; c'est plus fort que Verdun.

C'est que ça ne s'arrêtait pas! Une vision, si fantastique qu'elle soit en vous passant devant les yeux, peut bien vous jeter dans un pays irréel, mais vous en sortirez dés qu'elle est passée. Ici vous y restez, la vision ne passait pas, car, renversement de la raison, ce qui vous jetais dans un pays irréel c'était la réalité. Et ce pays était habité. Dan ce lieu, qui confondait l'esprit , des hommes se battaient. Où aucun être connu par sa constitution même vous aurait semblé pouvoir vivre des êtres vivaient!.....

Qu'a le Kronprinz à cogner ainsi pour avoir un chemin?...

Comme c'est le Kronprinz et qu'il a le droit au choix, il avait pris ce qu'il avait de mieux comme bélier. Les stosstruppen avaient été choisis. Craonne ne ne fut pas Verdun, ce fut plus que ça, ce fut Verdun concentré

Et ce fut moins, puisque Pétain, cet après midi, loin de Craonne et l'œil tranquille, passe une revue. (1)
 

 

Craonne c’est aussi, dans la mémoire, cette chanson antimilitariste qui rappelle les mutineries qui se développèrent durant tout l’été 1917

Adieu la vie, adieu l’amour,
Adieu toutes les femmes
C’est bien fini, c’est pour toujours
De cette guerre infâme
C’est à Craonne sur le plateau
Qu’on doit laisser sa peau
Car nous sommes tous condamnés
C’est nous les sacrifiés

 

SOURCES
Archives Etat Civil Mairie de Tréziers
Site Web Mémoire des hommes
Ministère de la Défense,  Service Historique de la Défense, Inventaires, Cote 684/1a5, Journal des Marches et des Opérations 122eme Régiment d’Infanterie.
Ministère de la Défense,  Service Historique de la Défense, Inventaires, Cote 26N 754/9, Journal des Marches et des Opérations 334eme Régiment d’Infanterie.

(1) Le Petit Journal

30/05/2016