BAGARRE AU BAL DE TREZIERS |
Dimanche 6 mars 1882, jour de la Sainte Colette, premier dimanche du carême, un bal organisé pour la jeunesse du village de Tréziers s'est terminé en pugilat. Ci dessous la publication dans le journal La Croix du Sud certainement par la plume du curé desservant la paroisse. |
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UNE PERIODE PARTICULIERE : LE TEMPS DU CARNAVAL QUI DEBORDE |
"Les jeunes gens de Tréziers avaient voulu continuer ce jour là (premier dimanche de Carême) les excentricités du Mardi Gras, et en particulier tous les désordres de la danse" rapporte le rédacteur de l'article. |
Il faut savoir que Le temps du Carnaval s'étalait de l'Epiphanie jusqu'à la veille du Carême, le jour du Mardi Gras. |
On mangeait la galette des Rois pour l'Epiphanie. Elle
commémore pour l'Eglise Catholique l'arrivée des Rois Mages venus adorer
Jésus. Dés lors commençait une période de réjouissances dont le Mardi
Gras était l'apogée. Il y avait des jours gras notamment les dimanches
où l'on faisait bombance. Cette période de réjouissances de mascarades
où on se déguisait en se moquant des autorités venait de loin. On
organisait des charivaris (lou carré) et des bals. Son origine, fort ancienne, nait de rites païens liés aux cycle des saisons et au travail de la terre. Comme bien d'autres ont d'abord été assimilés par les cultes aux divinités de l'Empire Romain puis ensuite christianisés. Pour l'Eglise catholique tout cela devait s'arrêter le mercredi des Cendres où débutait le temps du Carême qui se poursuivait quarante jours jusqu'au Samedi Saint la veille de Pâques. |
LES MUSICIENS - LES MENETRIERS |
"Les ménétriers furent assaillis et tiraillés de part et d'autre, les un voulant que l'autorité municipale leur imposa le silence, les autres ordonnant de redoubler leur cacophonie" |
Un ménétrier en langage "Ancien Régime" est un joueur de musique instrumentale travaillant essentiellement pour des occasions publiques et profanes, au moyen âge ménestrels. |
En ce temps là, cornet à piston et caisse claire suffisaient pour animer un bal. Un sieur P. de Peyrefitte du Razès est ici dénoncé. |
LES DANSES |
Le titre de l'article est sans équivoque : "Les
suites de la danse" ... "en excitant par ses cabrioles avec une
folle, ses élèves d'hier a se divertir" C'est, elle, la danse la source des maux, l'objet du délit, de l'offense à la religion. |
Une des plus populaires était le quadrille (quadrille des lanciers) héritier de la contredanse. Vinrent ensuite Polka et le Scottich. Elles demandait un apprentissage du fait de la complexité de leurs figures : "Professeur de danse à l'instar du sieur P. de Peyrefitte excitant par ses cabrioles avec une folle ses élèves d'hier à se divertir." |
UNE OPERATION POLITIQUE ? |
"Il y a à Tréziers deux partis acharnés qui s'observent et se préparent à l'échauffourée des élections municipales" |
Les élections municipales sont proches. Elles sont prévues pour le 15 mai 1892. |
Depuis des décennies le village voit l'affrontement plus ou moins âpre entre les cléricaux souvent royalistes et les républicains. Un des points d'affrontement fut l'achat puis l'entretien du presbytère. Celà va s'aggraver avec l'arrivée de Jean Pierre Laborgne qui dans ses prônes va lors des élection législatives de 1869 il va stigmatiser le progressiste Isaac Pereire promoteur du chemin de fer appelant à voter pour le clérical Léonce Guiraud. Il va à son initiative faire effectuer des travaux pour aménager une écurie pour son cheval et demander via le Préfet leur remboursement au maire qu'il a court-circuité. En 1872 il veut rénover le presbytère. Il organise des pétitions avec ses paroissiens demandant le partage des biens communaux. Nouvelle pétition plus agressive il demande que l'école publique soit dirigée par les sœurs Saint Joseph. |
Escarmouche après escarmouche la lutte va s'aggraver entre Cléricaux et anticléricaux. Le Conseil Municipal avec so maire Jean Louis Fabre demande son remplacement à l'évêque. En 1875 il obtient satisfaction. |
Le nouveau curé Exupére Goupil est aussi actif que son prédécesseur. Il va rénover les chapelles, animer me conseil de fabrique, solliciter le ministre du culte pour obtenir des aides. Il est intransigeant sur le respect du culte. Il va entrer en procès avec une famille de Corbiétrs qui l'accuse d'avoir admonesté ses enfants au prône |
En mars 1892 Jules Bosc était maire, Jacques Raulet son adjoint. Jules Bosc, fils de notaire , propriétaire du château depuis 1887 avait été élu maire l'année suivante. En tant que châtelain et propriétaire de l'aire où se tenait le bal et aussi en tant que maire, il était doublement impliqué. Son conseil municipal comptait nombre de cléricaux. Il se résolut à ce que "l'autorité municipale imposât le silence". Il refusa aussitôt d'accueillir les bals sur sa propriété |
La réponse des villageois lors des élections du mois de mai fut radicale. Sur les dix conseillers municipaux seulement deux : Pierre Faure et Firmin d'Esperonnat furent réélus |
La nouvelle équipa municipale fut clairement républicaine et laïque. Elle se choisit comme maire Pierre Faure. Il s'appuyait beaucoup sur les conseils de l'instituteur Julien Allard secrétaire de mairie. L'adjoint François Luga etait un anticlérical notoire. |
Le curé Exupére Goupil va être déplacé à La Serre de Prouille. Un nouveau prêtre Jean Niel est nommé. Il préside le conseil de fabrique 1892-1893. |
NOTA |
La lecture de cet article de presse, rencontré par hasard dans la base de donnée Gallica, a fait émerger le souvenir d'un lointain récit transmis par mon père Noel Faure qui le tenait certainement de sa grand mère Marie contemporaine des faits. Les jeunes se réunissaient le dimanche après midi sur une petite placette à l'est de la grande aire du château. Un joueur de cornet à piston et un tambourineur animaient le bal... Un jour la fête avait dégénéré en bagarre et le propriétaire du château avait refusé d'accueillir de nouvelles animations dominicales... |
SOURCES : |
JOURNAL La Croix du Sud du 17 mars 1882 |
Wikipedia |